Méthodes

Mais comment font-ils ?

Dans le principe, les méthodes sont simples. Ce qui l'est moins, c'est de maîtriser les technologies nécessaires. Mais pour comprendre le fondement, prenons un cas « simple ».

La paire téléphonique

Tout le monde connaît ces deux bouts de fil de cuivre qui permettent de brancher un téléphone ? Voyons déjà ce que l'on peut faire avec.

Bande passante du signal

Dans le cas du transport de téléphonie analogique, nous allons véhiculer sur cette paire de cuivre un signal électrique analogique (dont la forme d'onde est analogue à celle du signal acoustique), dont la bande passante va de quelques Hertz à 4 KHz. Tout simplement parce que c'est largement suffisant pour garder un message vocal compréhensible. On a coutume de dire que l'homme est en mesure d'entendre des sons entre 20 Hz et 20 KHz. C'est une approximation, bien entendu. Cette bande passante couvre l'ensemble des fréquences audibles. Si l'homme pouvait, avec ses seules cordes vocales couvrir un aussi large spectre, ce serait amusant… Un chanteur lyrique est capable de couvrir à peine un peu moins de trois octaves (d'une fréquence à 8x cette fréquence).

Bande passante du câble téléphonique

Si par ailleurs, on essaye d'évaluer la bande passante de la paire téléphonique, on arrive généralement à faire passer des fréquences allant jusqu'au Giga Hertz sur une longueur « moyenne » , entendons par là, la longueur moyenne qui relie un abonné à son centre de distribution. En pratique, c'est un peu plus complexe.

Conséquence directe

Il y a un formidable gaspillage de moyens. On sous utilise abominablement les ressources d'une structure existante. Pourquoi ? Parce qu'utiliser 100% des ressources de cette paire torsadée impose de mettre en œuvre des technologies complexes, donc chères, et qu'il faut les rentabiliser.

xDSL

Aujourd'hui, tout le monde court après les moyens de transports d'information numérique, connexion à l'internet oblige. Les technologies deviennent rentables et on les exploite. Ici, la solution consiste à utiliser des fréquences situées au dessus de 4 KHz, pour qu'elles n'interfèrent pas avec la téléphonie, et de les moduler pour leur faire transporter de l'information. Voyez le chapitre sur la bande passante pour plus de détails sur ces techniques. La moralité est que l'on peut obtenir une connexion Internet à « haut débit » (ADSL) qui va passer par la ligne téléphonique, sans perturber la téléphonie, le tout pour un prix acceptable, simplement en optimisant les ressources d'une installation existante.

La fibre optique

Sur la fibre optique, on va essayer aussi de trouver des technologies, qui, pour une qualité de fibre donnée, vont chercher à optimiser le flux d'informations dans cette fibre. En effet, la fibre optique, même la plus rudimentaire (saut d'indice) dispose d'une bande passante au moins égale à celle que l'on peut espérer d'une paire torsadée. Les fibres de type « gradient d'indice sont déjà beaucoup plus performantes. Quant aux fibres mono mode, elles disposent d'une bande passante incomparable.

Il existe « grosso modo » deux méthodes:

Multiplexage temporel

Là encore, prenons un cas simple.

Multiplexage temporel

D'un côté, nous avons quatre lignes à faible débit A, B, C et D, disons, 640 Kbits/s. De l'autre côté, nous avons une fibre optique qui pourrait passer facilement 100 fois plus… Autrement dit, alors que la ligne A par exemple, va mettre une seconde à déverser 640 Kbits, la fibre optique va faire passer ces 640 Kbits en 1/100 de seconde, et va attendre 99/100 de seconde le paquet suivant en provenance de la ligne A.

Ici l'on va tout simplement utiliser un multiplexeur temporel, qui va accumuler des paquets de données provenant des lignes A, B, C et D et les passer séquentiellement sur la fibre optique.

Dit autrement, vous avez quatre petites routes, où les voitures roulent pare-chocs contre pare-chocs. Ces quatre routes débouchent sur une autoroute à 10 voies. Les routes sont saturées, mais l'autoroute peut encore accepter beaucoup d'autres voitures.

Ce type de multiplexage s'appelle TDM (Time Division Multiplexing).

Dans cette approche, nous utilisons une fibre optique avec une seule source lumineuse. C'est peut-être dommage, parce que cette fibre, à l'image d'un câble de cuivre, peut faire passer plusieurs fréquences (longueurs d'ondes), donc plusieurs couleurs.

Multiplexage spatial

Sitôt dit, sitôt fait. Nous allons utiliser plusieurs lasers de couleurs différentes. Ces faisceaux lasers pourront voyager dans la fibre et être récupérés individuellement à l'autre bout, grâce à de « simples » filtres optiques.

Multiplexage spatial

Une fibre optique peut facilement transporter des longueurs d'ondes comprises entre 1 530 nm et 1 565 nm, nous sommes dans l'infrarouge (l'illustration fait apparaitre des couleurs pour la compréhension) et sur de la fibre mono mode. 35 nm d'écart, ça ne parait pas beaucoup. Oui, mais comme on sait séparer deux ondes lumineuses si la différence de longueur d'onde est de 0,8 nm et même 0,4 nm, alors, on peut passer dans la même fibre de  43 à 87 « lumières » différentes. Cette méthode s'appelle: DWDM (Dense Wavelength Division Multiplexing). Si l'on considère que l'on peut passer sans problèmes 2,5 Gbist/s sur chaque canal…

Avec cette méthode, il est même possible d'utiliser certains canaux dans un sens et d'autres canaux dans l'autre, ce qui permet de faire du « full duplex » avec une seule fibre.

Encore plus fort :

Paris, le 21 mars 2001 - Alcatel, (Paris: CGEP.PA, NYSE: ALA), leader mondial des réseaux optiques intelligents, a établi deux nouveaux records du monde pour des transmissions DWDM multi-Térabits. Le Groupe a d'une part franchi la barre mythique des 10 Tbit/s (10 000 Gbit/s), établissant le record mondial absolu de capacité de transmission sur une fibre optique. Alcatel a d'autre part réalisé une transmission record de 3 Tbit/s (3 000 Gbit/s) sur une distance transocéanique de 7 300 kilomètres. (Source Alcatel)

Mais...

Cette technique emploie:

  • De la fibre mono mode
  • une (des) source(s) lumineuse(s) laser, ce qui est obligatoire avec ce type de fibre.

La fibre mono mode a un diamètre de l'ordre de 10 µm (1/100 de millimètre). Ce n'est pas bien gros et on devine que les technologies nécessaires pour « enfiler » un rayon laser dans cette fibre ne sont pas simples. A fortiori s'il faut en faire passer plusieurs. Et il faut aussi récupérer les signaux à l'autre bout.

En d'autres termes, les performances de cette technologie n'ont d'égal que son prix. Tout le problème consiste donc à choisir la technologie la mieux appropriée à ses besoins présents et futurs, pour ne pas se retrouver avec un réseau

  • Ruineux parce que la technologie utilisée, trop chère, ne peut être rentabilisée.
  • Ruineux parce que la technologie utilisée, trop peu performante pour une raison de prix, ne pourra pas assurer l'inévitable croissance ultérieure, autrement qu'en multipliant les équipements de bout en bout du réseau.

Les sources lumineuses

Diode LED laser Le plus souvent, ce sont des diodes électroluminescentes. Il en existe de toutes sortes. Il en existe même qui sont capables d'émettre un faisceau laser.

Ces dispositifs ne sont pas énormes, témoin l'illustration ci dessous. L'allumette donne l'échelle.

Les capteurs de lumière

Les capteurs ne sont pas plus gros, ce sont des photodiodes, diodes sensibles à la lumière, qui permettent assez simplement de convertir une variation d'intensité lumineuse en variation de courant électrique.

Conclusion

La fibre optique représente assurément le meilleur moyen actuel pour transporter de très hauts débits d'informations numériques, et les besoins dans ce domaine vont probablement augmenter très fortement dans un avenir proche. Il est vraisemblable que la demande concernant un simple accès Internet, d'ici quelques années, sera identique à ce que l'on attend aujourd'hui d'un réseau local (100 Mbits/s au moins). Dans ces conditions, le panorama de l'information aura complètement changé. La téléphonie, la radio, la télévision et les transferts de données « informatiques » seront assurés par la même connexion, les interpénétrations de ces divers moyens d'informations seront beaucoup plus grands, c'est du moins un scénario tout à fait réaliste.

Les locations de films vidéo, les chaines de télévision dédiées à la cinématographie et la vente de CD Audio seront sans doute les premières activités remises en question.

Avec des débits équivalents à ceux d'un réseau local, l'internet va évoluer considérablement. Au choix, suivant les groupes de pression et les intérêts économiques mis en jeu, vers :

  • un internet de plus en plus « peer to peer » où le contenu va refluer vers la périphérie du réseau, ce qui serait dans le droit fil de la philosophie initiale de l'internet, mais irait à l'encontre de bien des intérêts économiques en place ;
  • un internet de plus en plus « minitelisé », où petit à petit, le contrôle de l'information qui circule sera remis entre les mains d'entités spécialisées vers le cœur du réseau, la périphérie du réseau ne devenant plus que consommatrice, comme nous l'avons connu avec le Minitel, exception nationale dont la France fut très fière, mais qui n'a jamais réussi à convaincre quiconque en dehors de nos frontières.

Note: La conclusion peut certes paraitre hors sujet (encore que, pour quelles raisons nos opérateurs marchent-ils à vitesse aussi forcée vers des débits toujours plus grands ?), mais elle mérite tout de même que l'on y réfléchisse.