Nous avons vu principalement deux types de modulation:
Eh bien, la solution vient d'être donnée, il suffit de combiner les deux types de modulation pour augmenter le rendement…
Et puis, on va même aller plus loin:
On est justement là pour le voir…
Il est grand temps maintenant de tordre le cou à une confusion présente dans bien des esprits: Il y a normalement une ENORME différence entre un bit et un baud.
C'est une valeur binaire (Binary Digit). Un bit = 0 ou Un bit=1. Il est impossible d'aller plus loin.
Encore appelé « cellule ». Nous avons vu qu'il fallait définir une durée minimale de modulation de la porteuse, pour pouvoir reconstruire le signal à la réception. Typiquement : Une demi période du signal modulant.
Dans la pratique, le nombre de symboles que l'on peut faire passer par unité de temps influe directement sur la largeur du canal.
»The number of discrete signal events per second in a data transmission »
(Définition officielle.)
Un Baud est donc une unité de vitesse, parler de bauds/seconde n'a aucun sens . Lorsque l'on module une porteuse, on le fait avec une modulation d'une valeur donnée pendant un temps donné. Exemple:
Je module une porteuse à 123 MHz avec un signal plat, pendant 0,15 µS (micro seconde, 0.15 x10-6 seconde). Ce signal plat peut prendre 4 valeurs: 0,25 ou 0,5 ou 0,75 ou encore 1.
Toutes les 0,15 µS (i.e. toutes les 150 nS), je change la valeur du signal plat. Je construis des symboles (ie. cellules) qui contiennent 2 bits! Pourquoi?
4=22 autrement dit, on peut définir quatre valeurs différentes avec 2 bits:
Taux de modulation | 0,25 | 0,5 | 0,75 | 1 |
---|---|---|---|---|
Equivalent binaire | 00 | 01 | 10 | 11 |
Voici ce que ça donne en simulation:
Si l'on s'y prend bien en choisissant judicieusement la durée de la cellule, le spectre de la porteuse modulée entrera dans la largeur du canal que l'on s'est donnée, et on y gagnera quand même en densité d'information transportée.
La vitesse en Bauds représente la quantité de ces cellules que l'on peut transporter par seconde. Dans notre exemple, 1/150.10-9 (les cellules font 150 nS) soit environ 6 mégabauds. Comme on transporte 2 bits par cellule, on est à environ 12 mégabits/seconde.
Un baud n'est donc pas forcément égal à 1 bit/seconde, il ne l'est même quasiment jamais et un modem V90 ou V92 à 56 kb/s n'est certes pas un modem 56 000 bauds. Il est clairement impossible d'obtenir une largeur de canal de seulement 4 KHz en passant 56 000 symboles par seconde.
Vous l'avez compris, le jeu va maintenant consister à enfiler le plus grand nombre possible de bits dans un seul symbole…
Rien n'interdit, donc, de moduler une porteuse à la fois en amplitude et en phase. Nous avons une porteuse que nous modulons en amplitude, seulement avec deux niveaux:
Taux de modulation | 0,5 | 1 |
---|---|---|
Equivalent binaire | 0 | 1 |
Bien entendu, avec cette méthode, nous ne transportons qu'un seul bit à la fois, chaque cellule ne contient qu'un bit.
Maintenant, nous allons en plus moduler en phase. Le déphasage sera nul ou égal à 180°
Taux de modulation | 0,5 | 0,5 | 1 | 1 |
---|---|---|---|---|
Déphasage | 0 | 180 | 0 | 180 |
Equivalent binaire | 00 | 01 | 10 | 11 |
Pour chaque niveau d'amplitude, nous avons deux cas possibles. Au total, ça nous en fait 4. Cette fois-ci, nous transportons 2 bits à la fois dans chaque cellule. Nous avons augmenté le nombre de bits pas seconde sans augmenter le nombre de cellules pas seconde (bauds), donc nous améliorons le débit de données sans augmenter la largeur du canal.
Une astuce d'électronicien, un peu déroutante, mais efficace quand même. Nous allons utiliser maintenant non pas une, mais deux porteuses rigoureusement de même fréquence. Elles sont déphasées de 90°
Ce qui est déroutant, c'est que lorsque l'on additionne deux porteuses de fréquence f0 en quadrature, on obtient une seule porteuse, toujours de fréquence f0:
Mais rassurez-vous, les électroniciens ont plus d'un tour dans leur sac et savent parfaitement reconstituer les deux porteuses initiales à partir de la résultante.
L'avantage de cette méthode est que la porteuse résultante n'a pas changé de fréquence, mais comme les deux « sous-porteuses » en quadrature vont être modulées indépendamment l'une de l'autre, nous pourrons transporter deux fois plus d'informations par cellule.
Dans le cas le plus simple, nous allons provisoirement abandonner la modulation en amplitude pour ne garder que la modulation de phase.
Phase de la première sous porteuse | 0 | 0 | 180 | 180 |
---|---|---|---|---|
Phase de la seconde sous porteuse | 0 | 180 | 0 | 180 |
Equivalent binaire | 00 | 01 | 10 | 11 |
Cette façon de faire permet une représentation graphique dans un plan :
Chaque axe représente une sous porteuse. La partie positive de l'axe représente un déphasage nul. La partie négative de l'axe représente un déphasage de pi (180°)
Par rapport à ce que nous venons de voir, nous ne gagnons rien de plus qu'une méthode supplémentaire, puisque le nombre de bits pas cellule demeure inchangé. Cette méthode de modulation s'appelle QPSK (Quadrature Phase Shift Keying).
Cette méthode de modulation est d'une « solidité » à toute épreuve. En effet, le décodage à la réception va se borner à détecter dans quel quadrant se situe le point.
Or, si la représentation graphique que nous venons de voir (appelée : Constellation) est d'une netteté quasi parfaite, voici ce que ça donne dans la réalité, avec les perturbations apportées par le bruit :
Dans la pratique, le point va se situer quelque part dans le nuage, décalé de sa position théorique par le bruit électronique. La surface du nuage sera d'autant plus grande que le rapport signal/bruit est faible, autrement dit, que le bruit est important par rapport au signal. La modulation QPSK permet de reconstruire l'information, même en présence d'un bruit important.
Cette modulation nous sera utile dans la suite, puisque les modems câble l'utilisent pour la voie remontante (upload).
Quadrature Amplitude Modulation. Nous l'utilisons ici avec 16 états, simplement en introduisant deux niveaux de modulation d'amplitude, au lieu d'un seul.
Pour chaque porteuse, nous reprenons le tableau déjà vu :
Taux de modulation | 0,5 | 0,5 | 1 | 1 |
---|---|---|---|---|
Déphasage | 0 | 180 | 0 | 180 |
Equivalent binaire possible | 00 | 01 | 10 | 11 |
Mais, grâce aux deux sous porteuses en quadrature, nous allons cette fois-ci transporter 4 bits par cellule, donc 24 états possibles soit 16 états.
Nous avons augmenté le nombre de points de la constellation, mais pas la largeur du canal d'émission, puisque le nombre de symboles émis par seconde (bauds) n'a pas changé. Dans la pratique, nous augmentons le débit sans augmentation de bande passante, mais au prix d'une relative fragilité du signal. En effet, les points de la constellation étant plus rapprochés, ils seront plus difficiles à décoder en cas de bruitage de la ligne.
Une autre façon de représenter la constellation consiste à utiliser un modèle vectoriel, qui est un outil mathématique plus adapté, parce que dans un repère polaire, il est représenté par un module (longueur) et un argument (angle). Comme nous avons ici deux porteuses en quadrature, nous aurons un point de fonctionnement qui sera défini par un vecteur égal à la somme de deux vecteurs en quadrature.
Si l'on reprend l'exemple de la modulation QAM 16, nous aurons par axe, donc par porteuse, deux vecteurs d'argument 0 et de modules représentant le taux de modulation d'amplitude utilisé et deux autres vecteurs de même module, mais d'argument égal à 180°. Comme les porteuses sont en quadrature, nous obtenons ceci, dessiné pour un seul quadrant. Bien entendu, la représentation complète reconstitue exactement la constellation vue plus haut. Au bout du compte, nous pouvons même oublier la représentation quadratique et raisonner sur une seule porteuse, qui sera modulée avec une amplitude (module du vecteur, sa longueur) et une phase (argument du vecteur, son angle) calculée par cette méthode.
La répartition des valeurs de symboles sur la constellation ne se fait pas au hasard, elle est normalement prévue pour optimiser la réception, lorsque la constellation a été abîmée par le bruit. Le choix judicieux de cette répartition se fait au moyen d'algorithmes complexes, qui sortent largement du cadre de cet exposé, surtout destiné à expliquer qualitativement comment se fait le transport de données.
Des algorithmes plus ou moins compliqués permettent de définir des constellations contenant de plus en plus de points, c'est à dire de plus en plus de bits dans chaque symbole. Ainsi, nous utiliserons des modulations de type :
Gardons présent à l'esprit que ces manœuvres ont comme conséquences :
Les protocoles de transmission de données comportent toujours des algorithmes de correction d'erreur et des algorithmes de récupération en cas d'erreur (répétition de l'émission des données), mais plus il y aura d'erreurs, plus on perdra de temps, si bien que vouloir passer trop d'informations à la fois peut aboutir à une perte de temps. (Problème bien connu sur les modems RTC).
En général, les modems sont prévus pour pouvoir se replier sur des modes de modulation disposant de constellations moins denses, plus faciles à démoduler en cas de bruit. Le débit diminue, mais le taux d'erreurs aussi.
Les divers types de modulations que nous avons vus ne sont que des exemples. Le principe reste cependant toujours le même, à savoir:
Ces règles sont bien connues des constructeurs de modems RTC, nous verrons également qu'elles sont applicables aussi bien pour les modems câble que les modems DSL.